ULTRA TRAIL TRANSAUBRAC

ULTRA TRAIL TRANSAUBRAC

ULTRA TRAIL TRANSAUBRAC 110KM, 3600M D+

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Samedi 20 avril, 4h15 c’est là que ça commence. Nous montons dans la navette qui nous emmène au départ de cette épreuve de folie. Nous sommes dans un tout petit village de l’Aveyron. Beaucoup de coureurs commencent à échanger, sur les temps aux ravitaillements, sur leur pronostics, bref de mon côté j’opte pour les écouteurs et je croise les doigts pour ne pas me blesser sur cette journée. Je n’ai absolument pas envie de tenter de jouer le haut du classement, je suis là pour voir ce que vaut ma préparation, le travail effectué, et ma stratégie est simple : je partirai dans la dernière vague et je ferai ma course de manière à la terminer dans de bonnes conditions.

Bertholène, 6h00.
Départ au pied du vieux château. L’ambiance est parfaite. Nous assistons à une magnifique montée au flambeau (du gymnase, nous montons au pied du château en suivant les flambeaux allumés le long du chemin, en pleine nuit.) puis à un superbe feu d’artifice qui marquera le départ de cet ultra une fois terminé ! Je discute avec plusieurs coureurs, des lillois, des bretons, des basques, pour beaucoup c’est la première fois qu’ils vont franchir le cap des 80km. Tout est prêt de mon côté et je m’élance sur cette course dans les 300ème. je n’ai absolument pas envie de jouer une place ou un classement. Nous sommes 400 en tout, je sais qu’au moins 1/4 des coureurs abandonneront avant le km 75.

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06h20
261ème/400
Alors que nous sommes partis depuis 20minutes, une voix familière m’interpelle. Je retrouve Sylvain avec qui j’avais fait équipe sur le Trail des Fontaines en février. Je m’étais blessé au km 23 et avait du abandonner. Nous nous retrouvons donc par hasard et on fait rapidement le choix de courir en duo sur cette épreuve. Le fait d’être à deux est un énorme plus. « Seul on va vite, ensemble on va plus loin »

7h50
15km d’effectués, et la réalité est difficile à accepter : La Transaubrac va être épuisante. Contrairement aux grandes courses de montagne que j’ai pu faire où l’on trouve des dénivelés positif monstrueux sur les cols, ici tout est « courable ». C’est le piège de cette course.. Partir trop vite. Je vois et j’entends beaucoup de coureurs qui partent sur leur allure marathon puisque c’est roulant.. Je fais exactement l’inverse et je me cale sur du 8 km/h. J’ai l’avantage d’être avec Sylvain qui est d’accord avec moi. Notre objectif premier est de ne pas s’attarder au premier ravitaillement (km 22) et d’arriver « frais » au km 54.

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08h57, KM 22, PREMIER RAVITAILLEMENT (500m D+)
232ème/400
Nous avalons les kilomètres petit à petit sans revenir sur trop de coureurs. On parle beaucoup des courses que l’on a fait, de celles qu’on voudrait faire..on parle du TOR des géants mais je n’avoue pas à mon partenaire qu’en septembre j’y serai. Je lui dirait plus tard sur la course et il me regardera comme un extraterrestre. Nous restons moins de 4minutes sur ce ravitaillement, nous faisons seulement le plein d’eau et on repart directement tout en conservant notre « allure de tortue ». On ne marche pas, mais on cours lentement et on prend le temps de discuter. Petit à petit le jour se lève, on a quitté la forêt et les paysages de l’Aveyron qui s’offrent à nous sont justes magnifiques !

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12h01, KM 42, La Vitarelle (1710m D+)
163ème/400
Passage à vide. Beaucoup de côtes, énormément de faux plats, et on arrive clairement pas à s’adapter à ce type de terrain. c’est très compliqué. On voit des coureurs solos qui subissent difficilement.. tête en direction du sol, mains posées sur les cuisses, ils n’avancent plus. On a fait 42km, on sait qu’il en reste 68…mais ça on ne se le dit surtout pas ! On regarde toujours le travail effectué, pas celui qu’il reste à faire ! Ce qui est sûr c’est que pour certaines personnes la fin de course ne sera pas atteinte et on entend déjà des coureurs parler d’abandonner au ravitaillement du KM52.
Je n’arrive plus à m’alimenter. Tout ce que j’ai sur moi ne me donne absolument pas envie.. Sylvain me passe une barre Baoouw (#XavierThevenard pour les traileurs 😉 ) que je mange à moitié, mais le mal est déjà fait.. Je suis en hypoglycémie, et sévère.. Je m’endors en courant, je discerne difficilement les couleurs et j’entends très mal. Je suis la silhouette de Sylvain qui m’ouvre le parcours en mettant un pied devant l’autre. je suis clairement complètement Hors Service. On est dans un groupe de 4 coureurs; plus personne ne parle. On regarde les montres et on sait qu’il nous reste peu, et puis d’un coup, au milieu de nulle part on voit le clocher de l’église de Laguiole ! On est plus qu’à 2km. On entre dans le village et après un dédale de rues on arrive dans le gymnase.

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14h05, KM 52, Laguiole (2018m D+)
152ème/400
Arrivé au gymnase je reprends mes bonnes habitudes. J’enlève mon sac de course, je mange, je bois beaucoup d’eau, je change complètement de tenue, je me met au chaud et je me masse les mollets qui sont durs comme de la pierre. 25minutes après nous repartirons. Je suis métamorphosé. J’ai les jambes légères, le rythme revient et on repart sur de bonnes foulées avec un très bon rythme de course à pied. On rencontre un breton, Yann, avec qui on fera un bout de chemin. On se relaye à 3 et la coopération du groupe est fluide. On avale à nouveau les kilomètres, le terrain est roulant, les paysages magnifiques, et là on se dit que finalement on va peut être aller au bout.

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17h46, KM 77, Buron des Bouals (2744 D+)
121ème/400
Les 8km qui ont précédé ce ravitaillement ont été un peu compliqués. De nouveaux problèmes d’alimentation et d’hydratation viennent perturber notre progression. L’eau se fait rare mais la famille de Sylvain qui nous suit au fil du parcours nous ravitaille…(ce n’est pas autorisé en temps normal mais à la vue des conditions personne ne nous a rien dit). Le ravitaillement au buron est juste impressionnant. Les organisateurs nous poussent, l’ambiance est top ! Il y a beaucoup de choses, et on se refait une santé. je change une deuxième fois de tenue. Je sais qu’il nous reste plus de 6h de course. La pluie s’et invité et le froid va suivre. On s’équipe donc en s’adaptant à notre environnement : veste goretex, bonnet, gants, cagoule, lycra et lampe frontale car dans 2h on aura plus aucune visibilité. On repart sur un rythme très lent, on marche beaucoup. Les jambes sont lourdes mais le mental est là ! On continue de discuter et on fait passer les km !

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19h46, KM 88, Cascade de Lacessat (2913m D+)
122ème/400
Nous sommes en pleine forêt, le jour commence à se coucher et la motivation en prend un coup au moral. Alors qu’on nous avait parlé d’un itinéraire roulant ou bien descendant on se retrouve sur des chemins glissants avec des raidillons de 200 à 300m de D+ qui montent affreusement. On reprend les bâtons et un pied après l’autre on avance. On est avec plusieurs coureurs, peut être un groupe de 10. Personne ne parle, le silence est roi.

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21h32, KM 98, Saint Martin de Monbon (3263m D+)
114ème/400
La nuit est tombée, nous sommes en pleine forêt et nous nous rattachons aux petits balisages présents tous les 50m. Les frontales éclairant notre progression mais on est clairement à bout. Pour Sylvain c’est physiquement que c’est compliqué, ses jambes lui font mal. De mon côté je sens que je craque psychologiquement. On n’y voit rien, il n’y a plus personne devant nous et plus personne derrière nous. On se croirait sur un tapis roulant géant et sur ma montre les kilomètres ne défilent quasiment pas. Je laisse Sylvain ouvrir car j’ai beaucoup de mal à discerner les balisages, les piles de ma frontales arrivant à bout de vie. J’en ai dans le sac, mais on est trempés à cause de la pluie et le fait de s’arrêter risque de nous fatiguer plus qu’autre chose. Puis on se retrouve face à une dernière côte.. On s’y engage, côte à côte, on essaye de se rassurer et de lâcher quelques blagues mais c’est très dur. Ça fait plus de 16h que nous courons, nous n’avons pas ou peu profiter des ravitaillements pour faire des pauses et on est entrain de s’éteindre à petit feu.

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22h40, KM 109, Saint Geniez d’Olt (3600m D+)
105ème/400
On a doublé une dizaine de coureurs dans les bois qui sont à bout. On leur a proposé à chaque fois de repartir avec nous et de se relancer mais la moitié n’avait même plus la force de nous répondre. On a décidé de courir, de courir le plus vite possible pour arriver le plus vite possible. On est en équipe depuis 15h, on pense à cette ligne d’arrivée et alors qu’on avait pris l’habitude de courir dans ce noir total et de ne voir aucune lumière, après un virage apparaît un mur, puis des lampadaires. On est à Saint Geniez ! On vient de comprendre que le trail est terminé. Il nous reste moins de 2km de route jusqu’au gymnase. On se challenge, et on court jusqu’au bout, on accélère et on arrive enfin sur la ligne. Là on capte qu’on est 105ème et 106ème sans jamais avoir voulu travailler le classement. C’est énorme. Pour une première sur cette distance cette année c’est juste fou.

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FIN DE COURSE
Et puis voilà, il est 22h47, cela fait plus de 16h que nous sommes partis et on a fait 110km. (123km selon Garmin..après on est plus à 13km près). Le fait de s’attaquer à cette aventure à deux a été une force. On prendra le temps de boire une petite bière et de manger avec la famille de Sylvain qui a été d’une grande assistance pour nous. La Transaubrac se termine et on voit au fur et à mesure le nombre d’abandons augmenter… On pense à ces coureurs qui ont lutté pendant une grosse partie de la nuit mais qui n’arrivent pas à temps aux heures de pointages, à ceux qui se sont blessés et à ceux qui ont tout simplement craqués psychologiquement. Ils sont 132 à avoir abandonné sur les 400 de départ. Pour ma part, mon abandon d’il y a 2 mois est très loin derrière. Dans un mois, décollage pour le Pérou sous les couleurs de l’association LL.NATHAN et de la MHIGE !
La veille de la Transaubrac je m’étais promis que si je ne finissais pas cet ultra trail je n’irai pas au Pérou. Le contrat est remplit. Direction Cuzco !

lien de la trace : https://tracedetrail.fr/fr/trace/trace/68467 

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